Geiko et fraternité
Il m’arrive, pour l’heure de plus en plus souvent, allez savoir pourquoi…, que lors du salut à la fin du geiko, surtout lorsque celui-ci a été viril, d’avoir l’irrépressible envie d’étreindre mon partenaire, adversaire de ce court combat.
J’éprouve à cet instant un profond sentiment de gratitude à son égard, pour avoir « partagé » pendant ce court moment, fait de men, kote et autres tsuki dévastateurs, ce moment d’intimité. Le maître mot c’est PARTAGER, sans retenue aucune, puisque nous nous sommes livrés dans un assaut sincère. Pendant ce court moment, c’est le cœur qui parle: plus je le rudoie, plus je le respecte, plus il me marque, plus il me considère. Ce langage de cœur à cœur, c’est notre intimité, difficilement explicable avec des mots.
Quelle est cette alchimie ? seulement accessible à partir d’un certain degré. Toutes les barrières sont tombées, celle de la langue, s’il s’agit d’un étranger (souvent Japonais), sociale, culturelle. Un combat sincère élève l’esprit, ouvre notre cœur à l’autre, vous vous souvenez : « bon kendo donne bon cœur, bon cœur donne bon kendo ». Voilà, la boucle est bouclée, enfin, on pourrait le croire, mais, fort heureusement ce n’est jamais bouclé.
Alors, lors de vos prochains affrontements, donnez-vous sans retenue, soyez impitoyable avec votre partenaire, pionnez-le, mais également recevez en toute humilité les points qu’il aura su vous marquer, sans chercher à éviter les frappes bien appliquées (en penchant la tête sur le côté, par exemple). Si une action mérite ippon, laisse-vous frapper, c’est le salaire de votre partenaire qu’il reçoit en échange de sa bonne préparation, à cet instant c’est le cœur et l’esprit qui parlent.
Voila, vous aurez partagé… Car à bien y réfléchir, l’autre, c’est vous-même… hé oui! Mais ça, c’est une autre histoire que nous traiterons dans une prochaine chronique.