Réflexions sur le kiai
Avant les passages de grade, nous discutons toujours avec les impétrants, forcément un peu anxieux, que le dojo va présenter. Ils se demandent souvent quelle attitude adopter en ce qui concerne le kiai. En effet, le kiai n’a pas uniquement un effet sur aite, il en a aussi un sur les examinateurs. Un bon kiai d’une voix puissante achèvera de convaincre les membres du jury en même temps qu’il leur prouvera la qualité des instructeurs de votre dojo (enseignants, senpai, anciens…).
Le kiai a trois fonctions principales:
- la première fonction a un effet sur nous-même. Ce kiai est sensé réveiller notre esprit combatif, nous sortir de notre torpeur et de nous préparer au combat. Cette fonction est connue des combattants depuis la nuit des temps.
- la deuxième fonction est sensée affecter directement l’adversaire. Ce cri puissant a pour but de l’impressionner et de le décourager de nous attaquer.
- Enfin, la troisième est de provoquer chez l’adversaire un état que l’on nomme shikai. Il fait directement référence aux quatre maux du cœur (parfois appelés les quatre défauts en kendo) à savoir: le doute, la peur, la surprise et la perplexité.
On peut voir certains, à peine relevés de sonkio, se libérer d’une voix stridente ou d’autres encore émettre des grognements… et puis après c’est un grand silence pendant tout le reste du combat. Crier MEN! lorsque vous lancez votre attaque est, bien entendu, nécessaire et ne pas le faire serait rédhibitoire en toute occasion. Mais il convient aussi de répondre au kiai de celui qui vous affronte et cela pendant toute la durée du ji-geiko.
Dans le Gorin-no-sho, Miyamoto Musashi nous enseigne d’utiliser les 3 formes de cri (mittsu no koe): sho (avant), chu (pendant), go (après). Sho: au début du combat la voix doit être la plus forte possible. Elle doit manifester de la force et de l’intensité. Chu: pendant toute la durée du combat la voix doit être grave et profonde et sembler émaner de tout le corps. Go: après la victoire la voix doit être forte et puissante.
Acquérir cette force et cette puissance vous permettra de triompher et de vous imposer. Après des années d’un entraînement inlassable vous pouvez voir que les grabds sensei sont en mesure de dégager pression et puissance sans même crier fort. En observant les affrontements du tournoi des hanshi (le fameux tournoi Meijimura) vous remarquerez qu’il parviennent même à développer une puissance vocale sans puissance sonore. Goro Saimura (hanshi, 10ème dan) a dit que le kiai est l’entrainement ultime de l’esprit et qu’il faut développer son esprit afin de ne pas être en proie au doute, à la peur, à la surprise et à la perplexité. Il a également dit qu’on ne pouvait le maîtriser qu’en s’entrainant au dojo avec un shinai en main.